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RANDONNÉE Promenade sur les traces des Custine n°2 | Mardi 12 août 2025 | Fervaques - La Croupte

Le mardi 12 août 2025, la Société des amis de Custine a organisé une deuxième randonnée dans le Pays d'Auge des Custine. Le parcours allait de Fervaques, village où Delphine et Astolphe de Custine possédaient leur château de 1803 à 1831, jusqu'à l'église de La Croupte, en passant par l'oratoire de la Vierge Marie dominant la vallée de Fervaques et l'église Saint-Aubin d'Auquainville, nécropole des Custine.

Lectures de textes de Custine et de leurs contemporains

 

Texte n°1 : Promenades autour de Fervaques : souvenirs d’un ami musicien de Custine

« Cette Lettre renferme une Description partielle des Jardins et de la Situation du Château de Fervaques ; la Désignation des Sites ou Paysages les plus pittoresques ; et de plusieurs Promenades dans les Lieux les plus champêtres des environs, entremêlées de Réflexions générales et de quelques Observations atmosphériques.

 

Monsieur,

Le plaisir que j’ai eu dernièrement à parcourir de nouveau les environs du charmant séjour que vous habitez, a dû vous prouver de plus en plus combien j’aime le beau pays de Fervaques, et combien je me trouvai toujours heureux de pouvoir y passer quelque temps de suite.

Vous avez pu voir et juger que personne n’apprécie plus que moi l’heureuse tranquillité et cette vraie liberté, la liberté réelle dont on jouit à la campagne : c’est un goût inné, prédominant chez moi ; mais ce n’est pas uniquement à ce goût, à mon amour pour les champs, ni à la beauté du pays que vous devez attribuer la prédilection que j’ai si souvent manifestée pour vos rians (sic) bocages ; c’est aussi, et plus encore, à un sentiment qui m’est également naturel, le souvenir des bontés de Madame (1) pour moi, et celui de l’accueil amical que l’on daigna toujours m’y faire.

Aussi ne quittai-je jamais ce séjour sans un peu de tristesse ; c’est pourquoi, tout en vous adressant les expressions de ma reconnaissance, je me plais à remonter aux époques des jours heureux que j’y passai, comme pour y chercher quelque dédommagement à mes regrets… et la revue mentale que je fais de vos environs m’amuse et me préoccupe d’une manière d’autant plus satisfaisante, qu’elle m’est aussi une sorte de compensation à l’ennui que j’éprouve de me retrouver au milieu du bruit et des embarras de la capitale, où tant de choses me déplaisent et dont j’aime si peu de chose. […] c’est surtout lorsque je viens de quitter vos paisibles vallons que le train de cette ville m’est le plus fastidieux. » (Henri-Philippe Gérard, Lettre descriptive à M. le Cte Astolphe de Custine, Paris, Kleffer, 1821, p. 2-4)

 

« [mes petites Observations, et les faibles Descriptions que je vous adresse, quel que puisse être d’ailleurs le prix que l’on pourra y attacher : elles sont aussi, et tout ensemble, un hommage que je prie madame de Custine de vouloir bien agréer ; et un tribut que je dois et que j’aime à payer au beau pays de Fervaques, pour tout le plaisir que j’ai eu à le voir, à le revoir, et à le parcourir de nouveau. » (Henri-Philippe Gérard, Lettre descriptive à M. le Cte Astolphe de Custine, Paris, Kleffer, 1821, p. 51)

 

Texte n°2 : Premières impressions de Delphine de Custine à Fervaques

« Nous sommes arrivés lundi à dix heures à Bernay : une mauvaise auberge, un encore plus mauvais souper et aucune nouvelle de Fervaques, voilà ce que nous y avons trouvé. Le lendemain sur les neuf heures, nous nous sommes mis en marche. Pendant quelques lieues de chemin horrible, nous n’avons rien vu, et toutes nos espérances se perdaient dans la profondeur des ornières lorsque, au haut d’une côte, au détour d’un bois, nous apercevons une file d'hommes à cheval qui, à notre aspect, se rangent en bataille, nous saluent militairement et s’approchent de notre voiture. Je reconnais Mr Jacquette, maire de Fervaques, qui me dit avec grâce et obligeance : « Madame, je n’ai pas pu contenir l’empressement des habitants de Fervaques et le désir qu’ils avaient de vous exprimer la joie que leur procure votre arrivée dans ce pays ». Moi toute rouge, à la portière, faisant des mines gracieuses, disant : « Je suis reconnaissante, touchée, confuse » etc etc... Le temps, moins accort, avait saucé la cavalcade qui, depuis deux heures, attendait en panne, malgré la pluie qui, en dépit de notre arrivée, continuait toujours. Alors de dire : « Quel temps ! Que je suis fâchée que vous soyez ainsi mouillés, mon Dieu, Messieurs ! », et des mines à l’avenant.

[…] Nous arrivons sur le territoire de Fervaques et, là, une troupe joyeuse me donne un bouquet. Une croix, sur la route, était ornée de fleurs ; enfin, hors la pluie, tout était fort agréable. J’oublie de te parler du pays : je n’ai rien vu de plus joli, de plus frais, de plus champêtre : c’est la Suisse en miniature ! » (Delphine de Custine, Lettre à Mme de Boufflers, sa mère, Fervaques, [mai 1804], Maugras)

 

Texte n°3 : Le conte de fées de Chateaubriand à Fervaques

« J’étais à la campagne quand votre billet de Fervaques m’est arrivé ; on avait négligé de m[e l]’envoyer à la campagne. Ne soyez pas trop fâchée de mon silence. Vous savez que j’écris, malgré mes dégoûts pour le genre épistolaire, et vous avez fait le miracle. Je m’ennuie fort à Paris, et j’aspire au moment où je pourrai jouir encore de quelques heures de liberté, puisqu’il faut renoncer au fond de la chose (2). Bon Dieu ! Comme j’étais peu fait pour cela ! Quel pauvre oiseau prisonnier je suis ! Mais enfin le mois de juillet viendra, je ferai un effort pour courir un peu tout autour de Paris, et puis j’irai un peu plus loin. Ce sera comme dans un conte de fée : Il voyagea bien loin, bien loin (et les enfants aiment qu’on appuie sur le mot loin), et il arriva à Fervaques. Là logeait une fée qui n’avait pas le sens commun. On la nommait la princesse Sans-Espoir, parce qu’elle croyait toujours, après deux jours de silence, que ses amis étaient morts ou partis pour la Chine, et qu’elle ne les reverrait jamais. J’achèverai l’histoire dans le département du Calvados.

Mille joies, mille souvenirs, mille espérances. Je vous verrai bientôt. Ecrivez-moi. Embrassez nos amis. Ecrivez à Fouché (3). » (Chateaubriand, Lettre à Delphine de Custine, Paris, mercredi 30 mai 1804, Correspondance Chateaubriand)

 

« Sans doute, j’aurais été plus heureux à Fervaques, si je puis être heureux quelque part. La solitude me plaît, mais souvent la vie m’ennuie. C’est un mal que j’ai apporté en naissant ; il faut le souffrir, puisqu’il n’y a point de remède. » (Chateaubriand, Lettre à Delphine de Custine, 2 décembre 1823, Chédieu)

 

Texte n°4 : Le bonheur à Fervaques selon Astolphe de Custine

« Nous avons fait très bon voyage et sommes entrés triomphants dans Fervaques il y a trois jours. Je me trouve toujours ici mieux qu'ailleurs: un sentiment intime m'avertit que j'y suis à ma place et, partout ailleurs, j'en éprouve un tout contraire. C'est que je ne veux, ici, que ce que je puis: n'est-ce pas là une des mille et une définitions du bonheur ? -et peut­-être n'est-ce pas la moins juste.

Fervaques me plaît doublement en pensant que vous y viendrez enfin, cette année. Je suis sûr que ce séjour te fera du bien. Le calme de cette contrée est contagieux comme l'agitation de Paris. Il y a une verdure primitive, et dont l'effet est de ramener l'âme à son état naturel: la paix et le conten­tement. » (Astolphe de Custine, Lettre à Mme de Boufflers, Fervaques, lundi 18 mai 1818, Maugras)

 

 

Texte n°5 : Fervaques thérapeutique selon Custine mère et fils

« Ma mère, qui sait seulement que vous êtes malade, dit comme pendant votre voyage d'Auvergne: "Il aurait bien mieux fait de venir ici !", comme si Fervaques vous eût rendu invulnérable. Et par le fait, vous n'y auriez au moins pas attrapé le même mal. » (Astolphe de Custine, Lettre à Édouard de La Grange, Fervaques, 5 août [1819], coll. particulière)

 

« J'ai été bien heureux de me retrouver dans notre fraîche et verte vallée; j'ai une confiance superstitieuse dans l'influence de ce séjour sur mon âme, et je suis persuadé que je serais mort ou perdu depuis longtemps sans mes retraites à Fervaques. » (Astolphe de Custine, Lettre à Edouard de La Grange, Fervaques, 3 septembre 1821, coll. particulière)

 

Texte n°6 : Une promenade d’Henri-Philippe Gérard à La Croupte

« De retour à Fervaques, et m’étant reposé de notre course à Honfleurs (sic), je vais, Monsieur, parcourir de nouveau d’Aval et d’Amont, les pittoresques alentours des vallons et des bois qui avoisinent le village ou hameau de la Croupte, au Sud-Est du château. Je sors par le jardin qui est de ce côté ; je passe la rivière et traverse l’herbage pour gagner le chemin de Courson ; je quitte bientôt celui-ci et je prends sur la gauche par un petit chemin moitié couvert qui passe entre plusieurs enclos, et aboutit dans l’un de ces champs où les pommiers, plantés à quelque distance les uns des autres, sont toujours presque régulièrement alignés.

J’en suis le sentier d’en bas, puis je passe çà et là par quelques-uns des détours creux, ou soit des bras alongés (sic) et fourchus de la vallée ; je suis la lisière des côtes boisées que je laisse à ma gauche ; chemin faisant, je m’arrête et repose mes yeux sur la belle verdure des prés qui sont à ma droite ; de là je m’achemine par en bas dans le vallon qui conduit à l’église ; après l’avoir vue et remarqué sa position, je prends par la droite, et j’arrive bientôt dans les grands bois de la Croupte ; je m’y dirige vers le petit vallon appelé Valsery, dont les maisons éparses çà et là, et placées par échelons, ne s’aperçoivent guère si ce n’est par les traînées de fumée qui s’élèvent en forme de colonne au-dessus de leurs toits, ou fuient obliquement à travers les masses de verdure qui les dérobent presqu’entièrement à la vue.

Après cela, je regagne la lisière ou terrasse qui est à mi-côte entre les deux vallons, d’où l’on a un très-beau point de vue ; puis je descends et remonte de suite dans les bois de la gauche, dont je parcourre (sic) les belles allées et les sentiers mousseux, tout en me dirigeant vers la ferme appelée la Maignerie ; et en continuant, dans cette direction, je reviens par la côte la plus rapprochée du bourg, en descendant le chemin appelé l’échelle de Jacob. » (Henri-Philippe Gérard, Lettre descriptive à M. le Cte Astolphe de Custine, Paris, Kleffer, 1821, p. 32-34)

 

Texte n°7 : La bénédiction de l’oratoire de la Vierge Marie (ou la chapelle de Fervaques) en octobre 1819 racontée par Astolphe de Custine et Henri-Philippe Gérard

« Malgré le silence dont vous m'accablez, je ne puis résister au désir de vous raconter la plus belle scène de notre été. L'évêque (4) est enfin venu bénir notre chapelle dont je vous ai déjà tant parlé, il a mis à cette cérémonie toute la pompe épiscopale, et l'effet d'une solennité religieuse en plein air, surtout dans un beau site, me paraît toujours irrésistible. Je suis effrayé souvent de l'incons­tance de mon âme: cependant, elle a un asile assuré dans la dévotion, et toutes les fois qu'elle y rentre, elle se retrouve chez elle. Je ne vis, de la vie du monde, que par excursion, et la seule existence qui me soit naturelle est la surnaturelle. Je vous ai bien regretté au moment où, sur les marches de la chapelle qui est située à mi-­côte au coin d'un bois d'où l'on découvre toute notre verte et paisi­ble vallée, l'évêque a prononcé une prière adressée à la Vierge, pa­tronne de la France, du diocèse et de la paroisse, en faveur de la mère et du fils, fondateurs de ce rustique monument. Tout le pays, malgré le mauvais temps, était rassemblé là, et pas un des assistants n'était resté debout, tant la vénérable figure du pasteur inspirait de respect, même à un peuple peu religieux ! Le temps avait été constamment pluvieux depuis plusieurs jours, mais, au moment où la prière fut finie, les nuages se déchirèrent, et un rayon de soleil, le seul qui parut de la journée, illuminant toute l'enceinte de coteaux qui forme notre vallée, vint tomber droit sur la chapelle. Je n'oublie­rai jamais l'effet de ce tableau, nous avions tous les larmes aux yeux. Une impression si vive pourrait être taxée de superstition, mais le changement qu'elle a produit dans mon cœur la justifie; je me suis senti dès ce moment comme assuré d'une protection spéciale, et obligé d'y répondre par tous les genres de sacrifices qu'impose le culte de celui dont les paroles sont esprit et vie. […] Je vous ai raconté l'arrivée de Mr de Chateau­briand; il nous est encore bien présent » (Astolphe de Custine, Lettre à Édouard de La Grange, [c.p. : 31 oct. 1819], coll. particulière)

 

« je fais une station à l’angle de l’un de ces bois, à l’extrémité de l’avenue où est située la chapelle, position d’où l’on plane sur le bourg et l’église de Fervaques. […] La station que j’ai faite à cette chapelle dans ma précédente promenade, m’a rappelé la belle et touchante cérémonie qui eut lieu le jour de sa consécration. […] Je me rappelle la vive impression que le sermon du digne évêque de Bayeux fit sur l’esprit des assistans (5) (sic) : et aussi, cette sorte d’étonnement religieux qui se manifesta parmi eux, et que tous éprouvèrent, quand, un peu avant et au moment de la bénédiction, le soleil éclipsé depuis plusieurs jours par d’épais nuages, reparut soudainement, dirigeant ses rayons sur la chapelle et sur les groupes de personnes prosternées ; et que, par cette subite apparition, il sembla vouloir assister et participer à la prière.

La position de cette chapelle, érigée à la Sainte-Vierge, est remarquable sous plus d’un rapport ; non-seulement elle est située sur une éminence, et à l’extrémité d’une belle avenue, de manière à être aperçue de tous les points des environs ; mais elle est aussi à l’entrée et comme à l’ombre d’un bois de chênes qui la couronne et la protège : je dis qu’il la protège, puisqu’il contribue par son aspect noble et imposant à inspirer le respect, le recueillement et la piété du passant ; comme il semble aussi, dès que son ombre épaissit les ténèbres, intimider le méchant ; le menacer de la vindicte du ciel ; enfin, accuser l’esprit de l’impie du manque d’un salut pieux, et son cœur du défaut d’une prière. » (Henri-Philippe Gérard, Lettre descriptive à M. le Cte Astolphe de Custine, Paris, Kleffer, 1821, p. 20-24)

 

 

1. Il s’agit de Delphine de Custine.

2. Chateaubriand évoque ici son mariage avec Céleste Buisson de la Vigne.

3. Joseph Fouché fut ministre de la Police sous Napoléon. Delphine de Custine en était proche : Chateaubriand espérait d’elle qu’elle puisse plaider la cause de Bertin l’Aîné qui, rentré de son exil à Rome sans autre autorisation qu’un passeport délivré dans la légalité la plus douteuse par Chateaubriand, risquait de s’attirer de sérieux ennuis. (Note de Julien-Frédéric Tarn)

4. M. de Brault, évêque de Bayeux.

5. « Après l’office solennel, et étant sous le dais, dans l’église paroissiale de Fervaques. » (Note d’Henri-Philippe Gérard)

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© Novembre 2025 par Samantha Caretti via Wix.com

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